Guide des toitures végétalisées et cultivées

Toutes les étapes pour un projet de qualité

(2) Définir son projet de végétalisation : tous les éléments à observer
Le bâtiment, support du projet de végétalisation


De nombreuses études soulignent les bienfaits de la végétalisation du bâti en ville. S’ils sont souvent difficiles à quantifier, ces bienfaits se concrétisent à différentes échelles - du bâtiment lui-même, du quartier, de la ville… - et dans différents domaines : gestion de l’eau, énergie,
cadre de vie, social, biodiversité… Les toitures peuvent afficher de multiples facettes, selon les bénéfices recherchés par le créateur du projet. Cette multifonctionnalité en fait un véritable atout pour l’aménagement urbain. Dans ce document, conçu par la Ville de Paris, la toiture végétalisée désigne un toit - élément porteur et complexe isolation-étanchéité - sur lequel est apposé un complexe de végétalisation* : composé éventuellement d’une couche drainante* et d’une couche filtrante*, du substrat de culture et de la végétation qui s’y développe, en contenants ou non. Une toiture dispose d’un accès plus ou moins contraignant - échelle, escaliers… - , par l’extérieur ou l’intérieur du bâtiment, d’un dispositif de sécurité - garde-corps, ligne de vie -, de chemins de circulation et éventuellement de zones sans végétation appelée bandes stériles.
* voir Lexique en bas de page

Les bienfaits des toitures végétalisées ou cultivées : des espaces à multiples facettes  

Pentes, surface disponible et conditions climatiques

Pentes

Il est possible d’installer une végétalisation sur une toiture en pente, à condition de prendre les précautions qui s’imposent pour éviter le glissement du substrat et des végétaux, notamment en cas de vent et de pluies.
Plus la pente est forte, plus la mise en oeuvre est complexe et généralement coûteuse. Des systèmes de retenue peuvent être utilisés pour limiter le glissement et les écoulements d’eau comme des sangles, des lattes, des planches ou des grilles et treillages : bois traité, métal résistant à la corrosion, treillage rigide.

Toiture végétalisée de l’école maternelle Alésia (XIVe)
photo Pascal Dhennequin

La composition du substrat - granulométrie*, éléments liants - et sa stabilité sont à étudier pour limiter les risques de glissement et d’érosion. Un bon enracinement est important pour garantir le maintien du complexe de végétalisation : fixation et stabilisation du substrat. Le choix des végétaux devra particulièrement tenir compte des capacités de rétention d’eau - écoulement vers le bas - et de l’exposition du toit : ensoleillée ou ombragée.
La réglementation (Norme NF DTU 43.1) distingue les toitures terrasses à pente nulle (inférieure à 1 %), plates (de 1 à 5 %) et les toitures inclinées de pente supérieure à 5 %.
Ces pentes peuvent être classifiées en quatre catégories, avec des caractéristiques techniques particulières pour leur végétalisation.

Surface disponible pour la végétation et les cultures

L’encombrement de la toiture doit être pris en compte pour évaluer l’intérêt de la végétalisation ou de la culture. Si la toiture a de nombreuses émergences techniques, cela réduira considérablement la surface végétalisable ou cultivable et rendra plus difficile la circulation en toiture. Notamment, lorsque les bandes stériles sont obligatoires autour de ces émergences.

Peu d’espace disponible pour la végétalisation : une toiture encombrée, crèche Nollet (XVIIe)
photo DEVE

Ensoleillement, vents, réfléchissements

Les toitures végétalisées ou cultivées sont souvent des sites où les vents, les écarts de température, la réverbération de la chaleur, la réflexion des matériaux, les ombres et les circulations d’air créent des conditions très particulières.
Les toitures, de par leur hauteur et les effets de couloirs, sont souvent exposées à des vents forts qui peuvent exercer une pression directe ou des turbulences, souvent plus faibles au centre et plus fortes dans les coins et les bords. Ces vents ont un effet desséchant sur le substrat et les végétaux, et peuvent également arracher en partie le système de végétalisation. Il peut s’avérer nécessaire d’alourdir le système dans les coins et à la périphérie. Un bon enracinement de la végétation limite fortement les effets d’arrachage du vent. L’utilisation de plantes tapissantes, le recours au paillage peuvent aussi constituer une protection contre l’érosion par le vent et le dessèchement.

La situation de la toiture doit être bien observée, afin d’évaluer la luminosité, les ombres portées des bâtiments alentour, qui peuvent créer différentes zones plus ou moins ombragées et humides. Les matériaux réfléchissants peuvent aussi avoir un effet important d’assèchement sur la végétation, et augmenter les écarts de température entre le jour et la nuit.

Il est important de prendre en compte les ombres portées
pour définir son projet. Conservatoire Paul-Dukas (XIIe)
photo Daniel Lifermann


 
Qu’est-ce qu’une toiture végétalisée ou cultivée ? Les éléments constitutifs et les techniques existantes  

Un point clé : la charge supportée par la structure du bâtiment

L’un des facteurs prépondérants pour la définition du projet de végétalisation est la charge que peut supporter la toiture. Elle dépend de la conception d’origine ainsi que de l’état et de l’âge des matériaux de construction : épaisseur de la couche de béton, espacement des chevrons, diamètre et disposition des aciers…

Calcul des charges induites par le projet = charges permanentes + la plus élevée des charges climatiques, d’entretien ou d’exploitation

Pour déterminer la charge induite par le projet, les charges et surcharges prises en compte sont :

  • Les charges permanentes
    • poids du complexe isolation thermique / étanchéité / pare-vapeur ;
    • poids du substrat, des végétaux et des couches filtrantes et drainantes ;
    • poids forfaitaire de sécurité fixé par les documents techniques unifiés (DTU) à 15 kg/m².
  • Les surcharges d’exploitation, d’entretien et climatiques
    • charge définie pour l’entretien fixée par les DTU à 100 kg/m² ;
    • charge d’exploitation, variable selon les usages et l’accessibilité des toitures - qu’elles soient végétalisées ou non -, de 100 à 600 kg/m² ;
    • charges climatiques en cas de neige, pluie.

Sur un bâtiment existant, si la surcharge admissible pour l’installation du complexe de végétalisation ou d’agriculture urbaine sur le toit est un peu faible, il est possible d’augmenter la portance en ajoutant des structures - poutres, colonnes, entretoises - à des endroits stratégiques. Les charges peuvent aussi être réparties en mettant les éléments les plus lourds au niveau des poutres ou près des murs porteurs : ces informations peuvent être demandées dans l’étude structure. Il est possible de construire un cadre qui reposera sur les contours de l’immeuble, sans s’appuyer sur le toit directement, et supportera le poids de la toiture végétalisée ou cultivée.
En cas de présence de gravillons, ils peuvent être éliminés et remplacés par le complexe végétalisé ou de culture. En effet, sur une épaisseur de 1 cm, le gravier pèse de 16 à 20 kg au
, ce qui représente près de 100 kg au , pour 5 cm d’épaisseur de graviers pouvant être convertis en substrat.
Une fois le diagnostic structure établi, il sera possible de connaître le type de végétalisation envisageable.
Cependant, chaque projet ayant ses particularités - type de substrat, variation d’épaisseur, contenants… -, un calcul précis doit être établi.

Les gravillons présents sur la terrasse peuvent être retirés pour mettre en place
le projet de végétalisation (crèche Gambetta, XXe)

 
Dans le cas où les plans de construction ne sont pas disponibles, il est conseillé de faire appel à un bureau d’étude technique, un architecte ou au Conseil d’Architecture d’Urbanisme et d’Environnement pour réaliser une étude de structure* afin d’évaluer si une toiture végétalisée ou cultivée peut être mise en place et de déterminer le type de toiture envisageable. Cette étude permettra d’évaluer la charge disponible pour la végétalisation et les usages futurs de l’espace ainsi aménagé, en tenant compte des charges totales que peut supporter le bâtiment.
 

 

Le complexe étanchéité-isolation et végétalisation : à vérifier ou rénover

Vérification de l’état de l’étanchéité

Les caractéristiques du complexe étanchéité et isolation, qu’il soit existant ou rénové lors du projet de végétalisation, doivent être prises en compte pour orienter les choix techniques. En effet, l’imperméabilité et l’isolation du toit doivent toujours être garanties après l’installation de la végétalisation ou des bacs de culture. De plus, il serait dommage que le projet récemment mis en place soit remis en cause quelques temps après son installation par une rénovation de l’étanchéité déjà programmée.

Les membranes d’étanchéité peuvent être dégradées par les écarts de température et les rayons ultraviolets, ceci entrainant des fissures et à terme, des fuites. Des éléments perforants - clous, vis - peuvent avoir été enfoncés dans l’étanchéité par le piétinement, lors des interventions d’entretien. Une vérification s’impose donc, grâce à différents tests spécifiques : mise en eau de la toiture pendant 24 heures minimum pour vérification des écoulements, détection par infrarouge de la présence d’humidité dans les matériaux. Les soudures, raccordements doivent être soigneusement examinés. La durée de vie moyenne d’une étanchéité est de 20 ans et jusqu’à 30 ans selon les matériaux et l’entretien réalisé.

Protection anti-racines

Il est indispensable de choisir une membrane d’étanchéité - en cas de réfection - ou de vérifier sa qualité et ses caractéristiques - en cas de maintien de l’étanchéité en place - pour garantir la résistance de la membrane d’étanchéité à la pénétration des racines. Les membranes d’étanchéité peuvent être composées de différents matériaux : matériaux en feuilles ou membranes collées, soudées ou fixées - bitumineuse ou en polymères synthétiques - et matériaux liquides appliqués à chaud ou à froid : résine ou asphalte. Les systèmes d’étanchéité liquide et membranes avec des revêtements à base de bitume, d’asphalte ou de toute autre matière organique, peuvent être sensibles à la pénétration des racines, et être endommagés par les micro-organismes présents dans le complexe de végétalisation.
Pour remédier à ce problème et garantir la compatibilité de la membrane d’étanchéité avec la végétation sur une toiture, certaines membranes contiennent un traitement chimique : produits chimiques biocides intégrés, cas des membranes bitumineuses. Les membranes en polymères synthétiques présentent quant à elles une résistance mécanique aux racines. Les membranes avec protection anti-racines mécanique sont à préférer aux membranes avec une protection chimique pour éviter tout risque de pollution des eaux de pluies par les produits chimiques.
Dans le cas où la membrane d’étanchéité en place n’est pas résistante aux racines et qu’il n’est pas prévu de réfection - étanchéité en bon état -, il est alors indispensable d’assurer une séparation complète entre la membrane d’étanchéité et le complexe de végétalisation, grâce à une nouvelle barrière antiracinaire : pose d’une nouvelle feuille d’étanchéité résistante aux racines ou ajout d’une nouvelle barrière indépendante de l’étanchéité.

Des normes existent pour les produits : norme NF EN 13948 ou test de pénétration aux racines de la FLL : Forschungsgesellschaft landschaftentwiklung Landschaftsbau - Groupement de recherche sur le développement et la réalisation en paysage.
Les thermoplastiques - PVC, polyéthylène, polystyrènes - sont généralement des barrières anti-racines efficaces. Des barrières textiles sont également vendues en couches anti-racines. Elles contiennent des produits chimiques qui stoppent la croissance des végétaux, par exemple de l’hydroxyde de cuivre. Cependant, la protection est moins forte, cible plutôt une végétation rase et risque de ne pas être efficace pour des plantes dont les racines ont un développement plus important : racines pivotantes, graminées, buissons…
En cas de maintien de l’étanchéité en place et d’ajout d’une nouvelle barrière anti-racines, il faut toujours s’assurer de la compatibilité des matériaux, afin de ne pas endommager l’étanchéité : certains matériaux sont dégradés par les acides humiques produits par la décomposition des plantes. La couche anti-racines peut être posée directement sur l’étanchéité, ou sur un voile, ou un feutre de séparation, pour permettre la compatibilité entre les matériaux. Le DTU 43.5 sur la réfection des ouvrages d’étanchéité apporte des informations sur la compatibilité des matériaux. Enfin, pour garantir une protection efficace, il est indispensable de prévoir une installation de cette barrière anti-racines selon les règles de l’art : importance des raccordements, soudures permettant d’assurer une bonne jointure des différentes feuilles entre elles, respect des relevés d’étanchéité…

Isolants

Les isolants utilisés en toiture - laine de roche, polystyrènes et autres mousses plastique alvéolaires, matériaux cellulosiques - sont classés en quatre classes de compressibilité (de A à D). Pour garantir le maintien de son pouvoir isolant - pas de tassement lié au poids de la végétalisation, qui risque de créer des étirements et des déchirures et perforations de l’étanchéité, notamment au niveau des fixations -, l’isolant doit au minimum être de classe de compressibilité C.

Avant toute nouvelle installation, il faut en premier lieu s’assurer de l’état
du complexe étanchéité-isolation et prévoir une réfection si nécessaire.
 
L’étanchéité nue, avec relevés d’étanchéité sur les bords, rue Corvisart (XIIIe) photo DPE
Couche anti-racines : toiture végétalisée en cours d’aménagement sur le collège Évariste-Galois (XIIIe)
 
Dans tous les cas - réfection de l’étanchéité ou ajout d’une barrière
anti-racines -, il convient de choisir un matériau approuvé
pour sa résistance à la pénétration des racines.
 
LEXIQUE couche drainante : couche poreuse, permeant l’évacuation des excès d’eau
couche filtrante :
couche retenant les particules qui pourraient colmater la couche drainante
granulométrie : taille des différents grains composant le substrat
étude structure : étude permettant de calculer les charges que peut supporter la structure du bâtiment, le poids supplémentaire qui peut être supporté sur la toiture existante.
 

complexe de végétalisation : ensemble composé de la couche drainante, la couche filtrante, le substrat et la végétation

.....
.
.
Guide des toitures végétalisées et cultivées

...........Toutes les étapes pour un projet de qualité
.........

 
........

........
Ce guide s’adresse aux maîtres d’ouvrages et techniciens de la construction autant qu’aux paysagistes et jardiniers. Il a pour vocation d’accompagner toute personne intéressée par la réalisation d’une toiture végétalisée ou cultivée - professionnel ou non - dans toutes les étapes nécessaires, de la conception à la mise en oeuvre de son projet. Date de parution : 2017


........
 
 


Dans ce guide, la Ville de Paris fournit des clés pour l’élaboration de projets de végétalisation ou d’agriculture urbaine sur toiture. Ces projets de végétalisation contribuent à la fois à préserver la biodiversité et à lutter contre les îlots de chaleur.
Il a été élaboré par la Direction des Espaces verts et de l’Environnement de la Ville de Paris :

   
 
  • Service des Sciences et Techniques du Végétal,
  • Jardin Botanique de Paris, Mission 100 hectares,
  • Centre de Production Horticole,
  • Service Communication et Événements,
  • Agence d’Écologie Urbaine,
  • Service d’Exploitation des Jardins,
  • Service des Affaires Juridiques et Financières,
  • Bureau de Prévention des Risques Professionnels ;
   
 

… en collaboration avec la Direction du Patrimoine et de l’Architecture et la Direction de l’Urbanisme.

adaptation-changement-climatique.gouv.fr