Loups,
chevaux, vaches, moutons, mésanges, fouines, faucons, girafes,
brochets, cerfs… cette manifestation croise le bestiaire grand-parisien
aux lieux qui lui sont dédiés tels que zoo, ménagerie,
jardin d’acclimatation, volière, aquarium, abattoir,
mais aussi aux dessins des édifices,
de l’espace public et aux tracés du grand territoire : ornementation
des édifices religieux et domestiques, pavillon de chasse, tracés
forestiers, cirques, hippodromes, écuries… jusqu’à
l’émergence d’une architecture animaliste
et d’une ville qui accueillent
la faune domestique et sauvage : façade à insectes, nouvelle
gestion des fleuves, des parcs... Suivant un déroulé
chronologique, l’exposition guide le visiteur au travers de 44 récits,
sondages dans le temps long de l’histoire
de la ville illustrant des basculements et des continuités qui
structurent l’histoire animale de la capitale…
Avant-propos |
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Le roi tué par un cochon, Les loups sont entrés
dans Paris, La ville aux 80 000 chevaux, Au menu du siège
de Paris, Transhumances en Île-de-France… autant
d’épisodes qui, en observant les lieux de partage
entre l’humain et l’animal, qu’ils soient
l’expression de tension, de collaboration ou de domination,
font entrevoir ce que pourrait être la construction d’une
ville vivante.
Cette
manifestation propose de construire une histoire animale de
Paris en articulant deux principaux objectifs. D’une part,
il s’agit de rendre visibles le rôle et la place
des bêtes dans l’histoire de la ville, et de révéler
que ce sont aussi les vaches, les mésanges, les loups,
les fouines, les faucons, les girafes, les chevaux, les brochets
et les cerfs qui ont fait le Paris d’aujourd’hui.
Alors que les animaux ont longtemps été effacés
ou minorés des récits dominants, l’histoire
que nous campons tente de mettre en lumière ce que la
présence animale a généré dans la
capitale.
En
menant cette enquête sur le temps long, en observant les
lieux de partage entre l’humain et l’animal, qu’ils
soient l’expression de tension, de collaboration ou de
domination, il s’agit de dégager des indices pour
imaginer ce que pourrait être un Paris à même
de créer une altérité avec l’animal.
La longue histoire de l’animal dans la ville, celle des
rôles qu’il a endossés, des lieux qu’il
a habités et façonnés, de la place qu’il
a pu prendre ou qu’il a dû laisser, cette histoire
des modes de cohabitation entre l’humain et l’animal
qui en découlent, nous offre une matière précieuse
pour identifier les freins et les leviers à activer aujourd’hui
en vue de penser les conditions de leur coexistence dans la
capitale.
Les quatre périodes qui structurent cette manifestation
rendent compte de quatre manières de cohabiter avec la
faune dans Paris. Avant-hier, qui s’étend
du Paris gallo-romain à la période préindustrielle,
met en lumière une cohabitation marquée par une
forme d’animalité de la ville, des bêtes
mais aussi une animalité humaine ; Hier souligne
combien le processus d’industrialisation de la capitale
met l’animal et la ville sous contrôle ; Aujourd’hui
révèle que les modalités de partition de
la ville et, plus largement, de l’espace entre humains
et animaux prennent des formes multiples, parfois antagonistes
; Demain suggère des pistes pour partager la
ville avec les bêtes. Partager, c’est à la
fois séparer et réunir, c’est trouver la
bonne distance, les ajustements appropriés, les conditions
heureuses pour qu’une coexistence puisse advenir à
Paris, entre tous les êtres vivants, dans ses rues, ses
bâtiments, sur ses toits, dans ses égouts, ses
jardins, son fleuve.
La prise en compte de l’animal se fait de plus en plus
prégnante dans de nombreuses métropoles, notamment
à Paris. D’un côté, les politiques
de préservation de la biodiversité participent
à accroître la présence de certaines populations
animales ; de l’autre, la dégradation des milieux
habités en zones rurales encourage la venue d’animaux
liminaires aux portes de Paris.
Le
mois de décembre, enluminure, in Les Très
Riches Heures du duc de Berry,
Pol, Jean et Hermann de limbourg, enlumineurs, vers 1411.
© Chantilly, musée Condé,
distr. RMN-GP/Michel urtado
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L’animal
aux fondements de Paris |
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Tarvos Trigaranus - taureau aux trois grues -, divinité
gauloise, bas-relief, du bloc 4 du pilier des nautes, Ier siècle
© Musée de Cluny
– musée national du Moyen Âge, dist. RMN-GP |

Fragmens de vases, de terre rouge, en leur grandeur naturelle,
in Claude-Madeleine Grivaud de La Vincelle, Antiquités
gauloises et romaines, recueillies dans les jardins du palais
du Sénat [...], Paris, chez François
Buisson, 1807 © BnF
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Nombre
d’événements rendent compte des relations
de cohabitation entre l’humain et l’animal dans le
Paris galloromain et médiéval. Quels rôles
ont les animaux dans la grande comme dans la petite histoire de
Lutèce, puis du Paris médiéval ? Quelles
typologies architecturales, quels dispositifs spatiaux, quelles
organisations urbaines cette cohabitation humaine et animale a-t-elle
générés ? Quelle est cette ville marquée
par des animaux dont on se nourrit et se protège, avec
lesquels l’on travaille et collabore parfois ? Une présence
animale qui, bien que le plus souvent sous contrôle humain,
demeure indissociable de son caractère sauvage, tant sur
le territoire urbain que dans l’espace domestique.
Lutèce
animale
Au
Ier siècle, le pilier des Nautes est érigé
au port de Lutèce par les bateliers de la Seine, en hommage
à l’empereur romain Tibère, et à Jupiter.
Dans sa partie haute, trois grues préviennent le dieu taureau
Tarvos Trigaranus de l’approche du dieu Esus, venu pour
l’emporter. Parmi d’autres divinités des panthéons
celtique et romain, un bas-relief de Cernunnos à cornes
de cerf orne le piler. Témoignant de l’importance
de l’animal dans la mythologie gauloise du peuple des Parisii,
le plus ancien monument de Paris est le marqueur d’une transcendance
de l’humain à l’animal à l’époque
gallo-romaine.
La
force humaine face à la bête féroce
Les
Arènes de Lutèce, construites à la fin du
Ier siècle par les Romains sur la montagne Sainte-Geneviève,
peuvent accueillir jusqu’à 17 000 personnes : Lutèce
compte 20 000 habitants à cette époque. S’y
tiennent des venationes, combats entre animaux sauvages ou entre
bêtes et gladiateurs : bestiarii et venatores.
Sangliers, cerfs mais aussi, en certaines occasions, ours, tigres
et lions sont lâchés dans l’arène. On
recherche alors les animaux les plus exotiques à travers
toutes les régions de l’Empire, pour des spectacles
fastueux s’achevant par leur mise à mort. L’Homme
affirme ainsi sa force face à l’animal dans ce qu’il
a de plus bestial et de plus sauvage. Si, au début du Ve
siècle, les combats de gladiateurs sont définitivement
interdits, les chasses d’amphithéâtre se poursuivront
néanmoins jusqu’au VIe siècle environ.
Dans
la maison antique
Qu’il
soit élevé pour nourrir la famille - porcs, chèvres,
moutons - ou destiné à lui tenir compagnie - majoritairement
des chiens -, l’animal occupe une place centrale dans la
maison et la vie quotidienne. Certains artefacts en témoignent
: empreintes d’animaux, fresques, mosaïques, bas-reliefs,
ossements, jeux ou encore ornements illustrent la dimension symbolique
des bêtes, porteuse du dialogue entre l’humain et
le monde sacré des dieux. |
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Statuette de lion,
nécropole de la rue Pierre-Nicole,
Ier-IIIe siècle, terre cuite blanche
© DHAAP, dépôt au musée
Carnavalet – Histoire de Paris
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Statuette de canard dans une nacelle en terre cuite blanche, trouvée
dans une tombe d’enfant de la nécropole de la rue Pierre-Nicole
et de Port-Royal - dite du sud-est -, Ier-IIe siècle ©
Paris Musées / Musée Carnavalet - Histoire de Paris |
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Le prince Philippe tué par un cochon, enluminure,
in Grandes Chroniques de France, 1332-1350 ©
British Library/ Bridgeman Images |

Dispositif
de piège à loups, enluminure,
in Gaston Phébus, Livre de la Chasse,
XIVe-XVe siècle © BnF |
Le
roi tué par un cochon
En
1131, le jeune roi Philippe de France, fils aîné
de Louis VI le Gros, se déplaçant à cheval
dans les rues étroites de Paris, percute un cochon domestique
et meurt quelques heures plus tard. Le récit de cet événement
tragique renseigne sur la présence, parfois informelle
et peu maîtrisée, du porc dans la ville au Moyen
Âge. L’accident royal accentue la volonté des
autorités municipales de légiférer contre
la divagation des porcs dans l’espace public et, plus largement,
d’y réglementer la présence animale. Les nombreux
textes de loi qui se succèdent sont cependant peu respectés,
jusqu’aux législations plus sévères
mises en place au milieu du XVIe siècle, qui auront finalement
raison du vagabondage des animaux.
Viandes
et poissons au Moyen Âge
Dans
le Paris médiéval, les animaux, sauvages ou domestiqués,
sont partout. Les défrichements, qui ne cessent de réduire
la part des forêts environnantes à partir du XIe
siècle, entraînent un essor de l’élevage.
L’animal fait partie de l’alimentation : on consomme
surtout moutons et bœufs, mais aussi, plus occasionnellement,
porcs, lapins, poulets, canards colverts et même chats et
chiens. Les boucheries ont un rôle déterminant. L’observation
de leur implantation au Moyen Âge fait apparaître
des positions remarquables et remarquées dans
la ville, comme celle de la Grande Boucherie de Paris, fondée
au début du XIIe siècle près du Châtelet.
C’est également au XIIe siècle que les bouchers
parisiens se regroupent en corporation pour bénéficier
de privilèges fiscaux. Au XIVe siècle, on abat chaque
mois près de 2 500 bœufs pour une population qui avoisine
les 200 000 habitants. Par ailleurs, la capitale médiévale
est un lieu de commerce important du poisson, qui fait partie
de l’alimentation des Parisiens. On trouve notamment dans
leurs assiettes harengs, merlans et morues, et, de façon
plus ponctuelle, anguilles, soles, turbots ou grondins en provenance
des mers et des rivières.
La
chasse au cerf, enluminure, in Horae ad usum romanum,
Livre d’heures de Marguerite d’Orléans, 1426-1438
© BnF
Les
loups sont entrés dans Paris
La
capitale fortifiée est fragilisée dans la première
moitié du XVe siècle par la guerre de Cent Ans,
les famines et les épidémies. Profitant de cette
vulnérabilité, les loups pénètrent
dans la ville au travers de brèches dans les fortifications
laissées à l’abandon. Leurs incursions sont
violentes et parfois spectaculaires. Le loup se déplaçant
souvent en meute, l’humain doit faire face à une
horde de bêtes agiles, voraces et intelligentes, qui s’aventurent
au plus près des habitations. Plusieurs événements
dans la capitale suscitent la terreur. Afin d’y remédier,
le roi Charles VII recourt alors à des méthodes
déjà explorées, comme l’emploi de louvetiers
dans les forêts royales ou la prime accordée à
quiconque abat un loup ou une louve : prime de 5 sous par bête
à Paris au XVe siècle. Mais, dans les années
1430, les attaques de loups sont de plus en plus fréquentes
: à titre d’exemple, au cours de la dernière
semaine du mois de septembre 1439, quatorze personnes sont dévorées
par des loups à Paris. En effet, une meute particulièrement
féroce, menée par un loup sans queue que les Parisiens
nomment Courtaud, sévit entre Montmartre et la
porte Saint-Antoine. Un groupe d’habitants parvient finalement
à acculer les bêtes devant Notre-Dame et les tue
à coups de pierres.
Enluminures
du Tacuinum Sanitatis, traité de santé et d’hygiène
rédigé par ibn bûtlan
au XIe siècle, vers 1450. © BnF
De
la chasse à l’ours à la chasse au cerf
De
l’époque gallo-romaine au haut Moyen Âge, le
cerf est un gibier méprisé au profit d’animaux
féroces comme l’ours et le sanglier. Mais, à
partir du XIVe siècle, les affrontements entre l’homme
et la bête sauvage, le corps-à-corps que supposent
ces combats violents, tombent en disgrâce et ne sont plus
l’expression de la puissance du chasseur. La chasse au cerf
prend dès lors l’avantage, engageant une relation
plus distanciée et sous contrôle avec l’animal
traqué, qui permet à l’homme de rester noble
et digne. À partir du XVe siècle, les forêts
domaniales sont aménagées pour la chasse à
courre, préfigurant une domestication du territoire. |
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. .Exposition
Paris Animal
..........Histoire
et récits d’une ville vivante.
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Exposition créée par le
Pavillon de l’Arsenal, Centre d’Urbanisme
et d’architecture de Paris et de la Métropole
parisienne
Association Loi de 1901 - Patrick Bloche - Président
- sous la direction de Henri Bony et Léa Mosconi
Présentée
du 29 mars au 3 septembre 2023
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Commissariat scientifique
Atelier
Bony Mosconi
Henri Bony, architecte, maître de conférences
associé à l’Ensa Versailles
Léa Mosconi, architecte, docteure, maîtresse
de conférences à l’Ensa Nantes, présidente
de la Maison de l’architecture Île-de-France
avec Fanny Benguigui, Marie Ducroc, Hugo Forté,
Soukaïna Jamaï,
Grégoire Leroy Noiton, Léa Mesnil, Louise
Tanant
pavillon-arsenal.com |
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Pavillon
de l’Arsenal
21,
boulevard Morland - Paris (IVe)
Du mardi au dimanche de 11h à 19h
Entrée
libre
L'accès est gratuit pour l'ensemble
des expositions et manifestations |
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