Les Grands Voisins
Intensions initiales, impacts réels et beaux imprévus, essaimage et perspectives
2015-2020 - Fabrique de biens communs - Ancien hôpital Saint-Vincent-de-Paul

Cinq années d’expérience collective
Dix intentions transformées en actes
Impact local, essaimage et perspectives



En 2015, on annonçait Ouvrir avec audace et générosité un espace temporairement vacant. À ce moment-là, nous avons choisi un nom :
Grands comme l’ambition de partager des valeurs d’hospitalité et de générosité. Voisins comme un lieu d’échanges et de sociabilité, un espace-temps pour tester, dans le réel, la rencontre de publics différents et les questions de solidarité au quotidien. Cinq ans plus tard,
à la veille de la fermeture du site, nous mesurons la réalité des impacts, nous regrettons certaines choses mais nous apprécions l’éclat
des moments vécus, et surtout les belles surprises. Nous réalisons aussi l’étendue des efforts qui sont à mener, partout ailleurs, ensemble.
L’expérience est belle, probablement imparfaite, très certainement infinie. Pour la suite, c’est à chacun de nous de se saisir de ce qui est compris, appris, partagé, vécu et aimé ici. L’histoire peut continuer de s’écrire et se prolonger ailleurs, pour plus longtemps.
Alors, à vous !

Cinq années d’expérience collective



Ampleur de l’expérience et enjeux

Les Grands Voisins, c’est l’expérience unique, aux conditions sans cesse renouvelées, d’utilisation d’espaces temporairement vacants, pour répondre à des besoins fondamentaux : se loger, se nourrir, se réaliser et partager un espace, du temps, de l’humain. Dans l’ancien hôpital Saint-Vincent-de-Paul, situé dans le XIVe arrondissement de Paris, une des plus grandes occupations temporaires d’Europe, aux usages et publics mixtes et variés, se déploie sur un terrain de 3,4 hectares. De 2015 à 2020, plusieurs milliers de personnes habitent, travaillent et partagent les espaces. Ils tissent d’autres manières d’être en ville ensemble et proposent des formes nouvelles de solidarité et de créativité.

L’expérience menée permet d’apporter des éléments de réponse pour résoudre des problématiques inhérentes aux métropoles contemporaines : de quelle façon peut-on accueillir et loger les plus démunis et leur laisser une place ? Comment trouver des locaux abordables pour lancer son activité, là où le marché les rend inaccessibles ? Quelles nouvelles formes pour des lieux de rencontres, de production et de création, pour laisser place à de l’implication volontaire et amatrice dans nos villes d’experts et de spécialistes ? Comment adapter nos modes de vie et transformer nos villes, face aux enjeux écologiques ?

La Cafèt’ Mobile : tisseuse de liens sur le site © Yes We Camp

Contexte, montage & partenaires

En décembre 2012, Cécile Duflot, ministre du logement, appelle à un choc de solidarité en demandant à plusieurs acteurs propriétaires de se mobiliser pour l’ouverture de leurs bâtiments vides. En réponse à cet appel, l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris prête gracieusement les locaux, progressivement vidés, de la maternité Saint-Vincent-de-Paul à son partenaire de longue date, l’association Aurore, qui ouvre deux premiers centres d’hébergement d’urgence dans les anciennes chambres de l’hôpital.
En 2014, la Ville de Paris, bientôt propriétaire du site, propose à l’association Aurore d’occuper l’ensemble des 3,4 hectares dans l’attente des travaux qui verront sa transformation en un quartier mixte à dominante de logements, avec la volonté politique d’une utilité des espaces pour le plus grand nombre.
Sous l’impulsion de la Mairie du XIVe arrondissement, l’association Aurore cherche à diversifier l’occupation des bâtiments pour entourer le travail social d’activités variées, en faisant le pari qu’elles viendront le nourrir. La coopérative Plateau Urbain accompagne la formalisation d’un modèle économique permettant d’assurer les coûts de gestion du site, en mettant à disposition des surfaces pour des associations, petites entreprises, artisans, artistes, en échange d’une contribution aux charges. L’association Yes We Camp se joint à l’aventure, réalise des travaux d’aménagements et propose une programmation culturelle qui accueille parisiens et riverains. Ensemble, elles contribuent à faire basculer les imaginaires du site : passer d’un hôpital désaffecté à un quartier habité.
Dès 2015, des objectifs communs sont formulés : favoriser la mixité sociale, encourager la création de communs et proposer des nouvelles formes de résilience en ville. En octobre, l’expérience trouve son nom : Les Grands Voisins. Une phase prototype qui dure jusqu’à décembre permet de tester la cohabitation de plusieurs types de publics : des résidents de centres d’hébergement, des occupants de locaux d’activités, des visiteurs du mercredi au dimanche et des campeurs et militants pour la période de la COP 21.
Entre 2016 et 2018, lors de la saison 1, jusqu’à 250 structures associatives et entrepreneuriales travaillent aux Grands Voisins, près d’un millier de personnes y sont hébergées et jusqu’à 5000 visiteurs par jour y sont accueillis.

La saison 2 marque l’arrivée des nouveaux propriétaires, Paris & Métropole Aménagement, les aménageurs chargés du lancement opérationnel du chantier de rénovation du quartier Saint-Vincent-de-Paul. Ils s’associent aux opérateurs de la saison 1 dans l’écriture d’un projet commun de cohabitation du chantier et de l’expérience Grands Voisins. Prolongée jusqu’à octobre 2020, elle se transforme et propose de préfigurer certains usages du futur quartier.

Les Grands Voisins : clap de fin

Dix intentions transformées en actes

Les Grands Voisins ont transformé dix intentions de contribution sociétale en actes et réalités. Voici la synthèse illustrée de ces cinq années.

Rendre utile des espaces provisoirement désaffectés

3,4 hectares vides dans Paris intra-muros à nouveau utiles : dès 2012, les services de l’hôpital se vident et les portes commencent à se murer. Les 19 bâtiments devaient rester clos, désaffectés et gardiennés. Mais, avec la conjonction de volontés politiques d’acteurs, dans le laps de temps de conception du futur quartier, les espaces retrouvent une utilité pour des personnes vulnérables ayant besoin d’un toit, pour des porteurs de projets à la recherche d’un espace de travail ainsi que pour les riverains, parisiens et visiteurs cherchant à s’impliquer dans des projets citoyens. Des espaces pour simplement boire un verre, se retrouver, se cultiver et se divertir dans un site préservé de la circulation.

Les résidents des centres d’hébergement aux fourneaux, saison 1 © Antoine Dogan

S’installer et vivre en cohabitation

Près de 2 000 personnes vivent et/ou travaillent sur place, dont plus de 1 000 personnes en hébergement d’urgence. Le site accueille plusieurs dispositifs d’hébergement pour les personnes vulnérables et crée des conditions de mixité sociale, avec un espace ouvert au public, des services mutualisés avec des lieux d’activités et des logements pour une petite partie des équipes de gestion. Le site devient pour chacun une maison ou une deuxième maison. Les cinq années d’ouverture font émerger des espaces communs accessibles à des publics très variés, en permettant un décloisonnement des métiers et mondes sociaux avec davantage d’interactions humaines. La mixité ne se décrète pas, mais l’expérience crée des conditions favorables au vivre ensemble. Cet espace intermédiaire est une chance, entre la brutalité de la rue et l’injonction à consommer des espaces privés, et permet aux résidents, aux occupants et aux riverains de se côtoyer, de se rencontrer sans a priori.

L’équipe de la Conciergerie Solidaire en mission voierie © Association Aurore

En cœur de ville, une place aux personnes en situation de précarité

Avec plusieurs centres d’hébergement, et de nombreux dispositifs d’insertion par le travail, par le soin et la sociabilité, la place des plus vulnérables est structurante dans le projet : ils sont sur site et présents au centre de l’expérience. Jusqu’à 600 personnes sont hébergées par nuit pendant la première saison. Près de 46 500 personnes sont reçues à l’accueil de jour pour demandeurs d’asile et réfugiés sur deux années d’ouverture. Cet accueil est ouvert du lundi au vendredi en journée et permet aux personnes d’être orientées vers des Centres d’Accueil et d’Examen de Situation ou vers des accueils de jour classiques et autres dispositifs d’accompagnement. Cet espace permet également de se reposer, se laver, manger et communiquer avec les familles. Près de 150 personnes vulnérables sont embauchées dans le cadre du Dispositif Premières Heures de la Conciergerie solidaire. Plus de 40% de ces personnes sont sorties du dispositif directement vers un emploi. La multitude d’activités et de publics construit un terrain propice à l’insertion par le travail avec une vingtaine de programmes ou de créations d’emplois développés.

Abacaxi, maroquinière qui utilise du cuir en tannage végétal et/ou upcyclé,
dans sa boutique-atelier
© Pierre Duquoc

Ouvrir des espaces de travail pour des pratiques émergentes

Une étude détaillée sur la nature des structures occupantes montre la répartition suivante : 37% des structures travaillant autour des arts, du spectacle et des activités récréatives, 22% sont des activités de service, 13% concernent l’action sociale, 8% l’éducation, 11% le secteur artisanal et industriel, 6% le commerce et la restauration et 3% sont des activités liées à l’agriculture et à l’environnement. Les espaces de travail sont proposés à ces structures à 250€//an TTC en ne prenant en compte que la surface nette des locaux, c’est-à-dire à une redevance quatre fois inférieure aux loyers classiques du XIVe arrondissement. Cela favorise le retour à la création au cœur des villes, à maintenir des savoir-faire artisanaux, artistiques et agricoles dans une logique de réemploi et de respect de l’environnement. Plus d’une centaine d’ateliers, boutiques ou espaces de travail sont occupés par des porteurs de projets ayant des difficultés à accéder au marché classique. 50 millions d’euros de chiffre d’affaire sont estimés sur la totalité des activités en 2017 et autant de valeurs et de richesses non monétaires créées. Les Grands Voisins ont servi de tremplin pour des jeunes structures en phase de test et d’amorçage, ou pour des structures un peu plus matures en phase de consolidation d’un modèle économique viable.

Carnaval Sauvage des Grands Voisins, février 2020
© Pablo Porlan Hans Lucas

Proposer un lieu d’expériences culturelles et artistiques gratuit

Plus de 300 événements culturels, éducatifs et artistiques gratuits proposés à plus de 600 000 visiteurs par an. Pluridisciplinaire et accessible à tous, la programmation est porteuse d’expérimentation et de création, alliant événements culturels - concerts, festivals, expositions, spectacles… -, activités régulières de bien-être, cours de pratiques artistiques et artisanales, interventions artistiques et aménagement des espaces extérieurs. Des temps forts rythment l’expérience : Syrien n’est fait, Migrant’scène, Carnavals, Choc Thermique, 48h de l’agriculture urbaine, la Petite Course CRIT... La programmation des Grands Voisins est toujours restée ouverte aux propositions pour demeurer hétéroclite, riche et dense. Tous les mois, des réunions de programmation sont ouvertes aux voisins intéressés.








Favoriser les interactions entre les différents métiers et disciplines

Des dizaines de secteurs professionnels sont représentés : urbanisme, architecture, réemploi, environnement, restauration, alimentation, culture, activités récréatives, artisanat, art, information, communication, éducation partagent et mutualisent les espaces. Les acteurs de l’expérience sont nombreux : les personnes hébergées sur le site, les associations et entrepreneurs, les voisins du quartier permettent la naissance de nombreux projets collectifs. L’émulation générale du lieu, la mutualisation des espaces communs et de réunions ainsi que la multitude de profils et secteurs d’activité sont des éléments clés pour favoriser un cadre de travail agréable et confortable.

Les structures installées coopèrent avec d’autres sur le site. Ces interactions mènent à une multitude d’aventures humaines, de rencontres fortuites, d’échanges de savoir-faire et de compétences divers et variés, et construisent un véritable écosystème.

Adrien Collet, artisan luthier et membre des Kacekode.
Ce groupe de musique est né de la rencontre entre musiciens résidents
des foyers d’hébergement d’urgence et d’occupants du site
© Adrien Collet

Offrir des cadres d’implication citoyenne

Plus de 5000 bénévoles impliqués en 5 ans

L’expérience est possible grâce à l’implication de nombreux bénévoles qui cherchent à apprendre et développer des savoir-faire. Les espaces, le matériel et les compétences professionnels présents sur le lieu permettent d’accompagner ces volontaires. Les missions sont variées et s’adaptent aux envies et aux besoins de chacun : aide à l’accueil de jour pour demandeurs d’asile, service au bar, cuisine, cours de français, construction à l’atelier... Beaucoup de missions allient travail social et formation spécifique.

Les lieux ont accueilli et supporté de nombreux événements associatifs.

Cuisiniers bénévoles pour l’aide alimentaire pendant le confinement,
dans les cuisines du restaurant commun l’Oratoire.
Distribution de 2500 repas/jour
© Pablo Porlan Hans Lucas

Faire avec ce qu’on a, en fonction du temps disponible

2 ans puis 5 ans : reconduction de la convention et succession de 3 propriétaires

Le temps imparti à l’expérience évolue et le projet des Grands Voisins s’adapte systématiquement, avec réactivité, inventivité et frugalité, pour répondre aux envies de la communauté d’habitants et voisins, aux besoins du quartier et aux ambitions et urgences sociales actuelles. Après deux années pleines sur la totalité de l’enclos de l’ancien hôpital, la coopération avec les aménageurs du futur quartier conduit à la réduction des espaces utilisables mais invente de nouveaux formats et usages pour la saison 2018-2020.

La réorganisation s’opère pour faire face à la crise du COVID-19 avec de l’aide alimentaire. 2500 repas/jour préparés et/ou distribués aux personnes en situation de précarité en 2 mois de confinement, et une partie jusqu’à la fin de l’été 2020. Les Voisins poursuivent les élans de solidarité et inventent d’autres utilisations des espaces disponibles : en plus des cuisines des restaurants mises à disposition, un atelier couture de masques et la fabrication de valves en impression 3D pour fabriquer des respirateurs sont mis en place.

Restaurant Les Comptoirs, expérience de concomitance complète
entre une équipe de cuisine professionnelle
et des non-professionnels en insertion, saison 1
© Yes We Camp

Construire un modèle d’économie et de gestion réactif

2M d’€ de gestion annuelle sur un budget commun entre les 3 organisations de pilotage

L’évolution du budget au fil des années aboutit à une trésorerie partagée entre les 3 structures pilotes et une répartition des risques financiers. Il permet de constituer une équipe d’une vingtaine de salariés, mêlant différents types de profils et permettant d’assurer une gestion quotidienne souple et proactive du lieu.

L’animation de la communauté est assurée par des permanences, temps forts, moments collectifs, petits déjeuners et repas partagés.

Conseil des Voisins à l’Amphithéâtre du bâtiment Lelong, saison 1 © Yes We Camp

La gestion du site fonctionne avec un pilotage général et différents cercles de travail sur divers sujets, auxquels tous les voisins peuvent participer : aménagement d’espace, travail social, programmation culturelle…
Les Conseils des Voisins, où chacun est convié, s’organisent tous les deux mois pour échanger sur les dernières évolutions du projet et partager les informations. Les trois organisations de pilotage suivent des réunions hebdomadaires pour rester réactives sur la gestion quotidienne.

Impact local, essaimage et perspectives

Les passerelles avec le nouveau quartier Saint-Vincent-de-Paul

Avant la rencontre, les ambitions sont déjà partagées : répondre aux enjeux de pouvoir habiter la capitale pour les personnes défavorisées, construire une ville qui permette de vivre dans les conditions climatiques à venir, cultiver une diversité d’usages et de pratiques.

En étant à l’initiative de la deuxième saison (2018-2020) des Grands Voisins, Paris & Métropole Aménagement, la Ville de Paris et la Mairie du XIVe arrondissement ont permis de nombreuses influences réciproques, notamment au travers de moments d’échanges réguliers nommés les ateliers de la transition, qui ont permis de se nourrir les uns les autres et de partager les expériences.

Une partie du programme immobilier s’est adaptée aux révélations de l’expérience et un fil rouge a été tiré entre l’expérience des Grands Voisins et le futur projet urbain : une forte dimension économie sociale et solidaire, un rôle de tremplin immobilier pour les locaux d’activités avec des loyers différenciés, l’intégration dans la programmation logement d’un centre d’hébergement d’urgence et d’une pension de famille, la démonstration de l’attractivité des commerces et de la pertinence de lieux communs et enfin un état d’esprit pour tester et expérimenter à chaque étape.

Bien sûr, les ambitions écologiques du quartier sont au premier plan avec des enjeux forts : gestion des eaux pluviales à la source, 4 000 m² de nouveaux espaces verts, réutilisation de plus de 50% des bâtiments existants, le travail sur le réemploi des matériaux, la récupération de l’azote et du phosphore des urines, testé pendant les Grands Voisins. Au-delà de la livraison des espaces du quartier, les modes de gestion et de vie du quartier sont questionnés. L’expérience du temporaire inspire à PM&A des réflexions sur les montages pour le futur écoquartier : la dynamique participative - avec par exemple la sélection d’un panel de futurs locataires par les bailleurs -, la mise en place d’un gestionnaire de quartier et des socles d’activités, l’émergence de lieux fédérateurs comme la Lingerie, le restaurant Oratoire ou encore la Pouponnière.

Point de vue : weekend festif autour du chantier, organisé avec PM&A © Retouramont

Où vont les voisins de la communauté ?

Les voisins résidents des centres d’hébergement

Les centres déménagent vers d’autres lieux et les personnes accueillies bénéficient d’un accompagnement vers des solutions adaptées. Avant d’arriver sur le site des Grands Voisins, certains services d’hébergement ont déjà déménagé plusieurs fois. Le temporaire est souvent le lot des lieux d’accueil des plus vulnérables, à défaut de pouvoir trouver des places plus pérennes, faute de portage politique global. À la suite de nos échanges avec Paris & Métropole Aménagement et la Ville de Paris, nous sommes fiers d’annoncer que le futur quartier intègre la construction en fixe d’un Centre d’Hébergement d’Urgence d’une centaine de places et d’une pension de famille de 25 places.

Les voisins de l’Accueil de Jour pour demandeurs d’asile et réfugiés

L’accueil de jour permet aux personnes accueillies d’être orientées vers les différentes démarches administratives et d’accès à la santé et/ou au logement, de se reposer, se laver, de charger son téléphone pour communiquer avec les familles à l’étranger. Un bâtiment situé quai d’Austerlitz poursuit l’activité pour environ 140 personnes par jour, il est augmenté d’un accueil de jour destiné aux familles.

Accueil de Jour, bâtiment Rapine © Association Aurore

Les voisins des bureaux, boutiques et ateliers

Chacune des structures occupantes a bénéficié d’un loyer modéré lié à un contrat d’occupation à durée limitée. Certaines ont pu se développer économiquement, se structurer davantage et s’orientent vers des locaux plus pérennes sur le marché classique. D’autres, en reconversion, en test d’activité, vont chercher à s’implanter dans d’autres occupations temporaires, espaces de bureaux partagés ou ateliers d’artistes de la Mairie de Paris.

Certaines structures en co-working mènent leurs recherches immobilières de manière collective pour avoir plus de poids dans leurs démarches. D’autres, tentées par l’aventure des Grands Voisins, se lancent afin de monter un projet d’occupation temporaire.

Ces structures sont accompagnées pour la suite, avec des ateliers de recherche immobilière pour permettre à chacun de présenter ses objectifs et ses besoins et d’étudier les différentes options.


Transmettre l’expérience et inspirer ailleurs

Des dizaines d’expériences similaires développées en France

L’expérience a rapidement démontré son intérêt pour ses usagers,
mais aussi pour la société dans son ensemble de par les nombreuses externalités positives qu’elle génère. Une cinquantaine d’acteurs est venue
à notre rencontre dans la volonté de développer ce type de projets dans des villes de 700 à 8,6 millions d’habitants en France, Belgique, Allemagne ou
États-Unis. De plus, des centaines de sollicitations sont reçues pour
des visites et demandes de participation à des conférences de la part
d’acteurs publics et privés : Ted X, MIT, Urban Maestro, Ashoka Talks,
Open Design Afrika Festival, Pavillon de l’Arsenal...
Plusieurs distinctions récompensent l’expérience, comme l’exposition
de la Biennale internationale d’architecture de Venise 2018
Lieux Infinis,
les trophées de l’économie sociale et solidaire décernés par la Ville de Paris
ou le Palmarès des Jeunes Urbanistes.

Photo d’équipe pour la Biennale
d’Architecture de Venise en 2018
© Yes We Camp

Conclusion

Le plus grand risque pour la société serait de perdre la possibilité d’essayer.

Nous sentons les écueils du développement de villes-aéroports, avec toujours plus de techniques, d’experts, toujours plus d’écrans, de contrôles, toujours plus de chacun pour soi et de mécaniques à la recherche du risque zéro.
Elles produisent non seulement des surcoûts à long terme, mais aussi
une désincarnation des pratiques, de la fragmentation sociale,
une défiance permanente, un sentiment d’impuissance généralisé.

Alors, comme nous avons pu l’inventer et le réaliser ici, il y a urgence à
faire qu’ailleurs, ces groupes, ces manières de faire et ces lieux, autogérés, hybrides, émergents, insaisissables, spontanés, imparfaits, sans doute imprévisibles, soient accueillis, encouragés sur la durée et soutenus par les pouvoirs publics. Utilisons les espaces
disponibles pour les faire émerger. Nous avons beaucoup à gagner, à tenter d’établir des espaces de confiance mutuelle, à prendre le risque, ensemble, d’essayer de nouvelles manières,
plus soutenables et solidaires d’habiter le monde.

Construits de manière inclusive, portés par la société civile, ces lieux infinis sont révélateurs de nos capacités collectives à nous organiser différemment.
Ils sont de puissants moteurs pour la transition sociale, culturelle et écologique qui s’annonce, car le plus souvent, ils essaient d’opérer
avec joie, partage, poésie et beauté.


Les Grands Voisins
2015-2020 - Fabrique de biens communs - Ancien hôpital Saint-Vincent-de-Paul, Paris (XIVe)

Les Grands Voisins sont une forme de démonstration par le réel : il est possible de créer des réponses aux crises globalisées, et ceci par une accumulation de solutions locales et spontanées, d’îlots créatifs et pragmatiques, de territoires vécus et vivants. Les issues ne sont pas toutes concrétisables en cinq ans d’expériences sur l’ancien hôpital Saint-Vincent-de-Paul. Si nous avons mobilisé, ému, et contribué à déclencher ici et ailleurs, les efforts sont à poursuivre, et la transition que nous avons tous à mener est immense. Les Grands Voisins ont démontré que l’occupation temporaire à vocation sociale, culturelle et de transformation sociétale pouvait être synonyme d’attractivité, de progrès, d’innovation et de succès.



Table ronde de clôture de
l’aventure des Grands Voisins
Comment construire
la ville inclusive de demain ?
(vidéo, 1:05:28) +>>








Les coordinateurs

Aurore : L'association était depuis 2014 le gestionnaire principal de l’ensemble du site, elle assurait la coordination générale du projet et en porte la responsabilité technique et financière, gèrait l’accueil de jour et les centres d’hébergement ainsi que l’accompagnement des personnes accueillies vers l’autonomie, en proposant des solutions d’insertion par l’emploi.

Plateau Urbain : La coopérative contribuait à la coordination générale, coordonnait le choix et la gestion des occupants des locaux et animait leur réseau, participait également à la coordination technique du site.

Yes We Camp : L'association contribuait à la coordination générale et portait la responsabilité de l’ouverture du site aux publics : direction artistique, communication publique, partenariats locaux, programmation culturelle, identité visuelle, aménagements dans les espaces communs…

lesgrandsvoisins.org