L’étude
autour de l’évolution de la nature à Paris propose
un atlas cartographique inédit. 6 cartes, 1730, 1830,1900, 1930,
1975 et 2017, permettent de saisir les interactions entre les espaces
plantés et les espaces bâtis dans Paris au cours de quasiment
trois siècles de transformations urbaines, au moment où
s’écrit un nouveau contrat entre la ville et la nature. Aujourd’hui,
la nature est au cœur de
l’attractivité des villes à la fois alimentaire, environnementale,
source de plaisir et de beauté. Elle est un équipement public
du
XXIème siècle. On compte aujourd’hui 15 ha d’agriculture
urbaine déclarés, soit quasiment le double des années
70, dans
une ville comme Paris, qui par ailleurs a construit de nombreux logements
et équipements et augmenté sa surface
d’espace verts publics et privés de près de 400 ha
en 40 ans pour atteindre 1420 ha en 2017.
|
En 1730, la nature occupait plus de 73 % des 105 km2 du
Paris d’aujourd’hui : 3 820 ha de grandes cultures,
960 ha de maraîchage et 500 ha d’arboriculture auxquels
s’ajoutaient 1 200 ha de bois et 450 ha de jardins privés.
La ceinture maraîchère qui approvisionnait les
parisiens en fruits et légumes occupait les espaces situés
au-delà des actuels grands boulevards et les coteaux
avoisinants de Belleville - rue du Pressoir -, Montreuil - allée
des Pêchers - ou encore Charonne : rue des Grands Champs.
En 1845, 1 800 jardiniers- maraîchers étaient encore
recensés dans la petite couronne, exploitant des surfaces
de 0,5 à 1 ha. À cette époque, 95 % des
fruits et légumes consommés par les parisiens
étaient produits en Île-de-France. Les parcs et
jardins, qui étaient des espaces privés avant
la révolution, s’ouvrent peu à peu au public
et le premier jardin public ouvre 1848, c’est le jardin
de l’archevêché, actuel square Jean- XXIII,
situé à l’arrière de Notre-Dame.
Alors
que le nombre des espaces verts publics et privés a doublé
entre 1900 - 564 ha - et 1975 - 1 072 ha -, le maraîchage
disparaît quasiment de Paris dès 1900 : 9,6 ha.
Il réapparaîtra ponctuellement sur la zone des
fortifications en 1930 avec 153,7 ha pour disparaître
à nouveau dans les années 70 : 8,3 ha. Ce phénomène
est général dans la zone urbaine dense. La Chambre
d’Agriculture d’Île-de-France enregistrait,
en 2010, 91 exploitations agricoles en petite couronne, dont
seulement 12 % dédiées au maraîchage. La
ceinture maraîchère se retrouve aujourd’hui
à plus de 100 km de Paris, en Picardie ou encore dans
le Val-de-Loire.
Plusieurs
dispositifs engagés ces dernières années
favorisent le retour du maraîchage en ville au travers
d’incitations réglementaires - plantations des
toitures, des murs -, de progrès technologiques et de
possibilités ouvertes à l’instar du permis
de végétaliser, des jardins partagés et
des appels à projets comme les Parisculteurs dont le
succès va croissant. On compte aujourd’hui 15 ha
d’agriculture urbaine déclarés, soit quasiment
le double des années 70, dans une ville qui par ailleurs
a construit de nombreux logements et équipements et augmenté
sa surface d’espace vert public et privés de près
de 400 ha en 40 ans : 1 420 ha en 2017.
Au-delà
de son rôle nourricier et d’agrément, la
nature dans la capitale a toujours eu un rôle essentiel
de santé publique. Dès 1833, Rambuteau puis Hausmann,
en lien avec les théories hygiénistes, généraliseront
la présence des arbres d’alignements dans la capitale
portant à 100 000 le nombre d’arbres d’alignement.
On reconnaît alors aux alignements un rôle technique
de stabilisation et d’assainissement de la chaussée,
ainsi que des qualités esthétiques et climatiques.
À
partir des années 30, l’urbanisme moderne souligne
l’importance de l’introduction de nature dans la
vie quotidienne, accompagnant le changement de société
initiée par l’apparition des premiers congés
payés en 1936 et l’invention de la pratique des
loisirs pour tous. Les jardins deviennent espaces verts
et accueillent les loisirs quotidiens. Les loisirs hebdomadaires
sont portés par les grands parcs - 27 grands parcs de
plus de 100 ha en métropole -, les parcs sportifs - 1
600 ha en métropole, dont 214 ha à Paris -, les
îles de loisirs - 12 en Île-de-France dont 2 en
métropole - et les forêts périurbaines :
6 300 ha en métropole, dont 995 ha à Paris.
En
2017 la nature à Paris est à la fois alimentaire,
environnementale, de plaisir et de beauté. Elle est un
équipement public du XXIe siècle.
|
  
|
La
nature à Paris en 1730
|
|
Jusqu’en
1730, la nature est très proche de Paris et très
confidentielle en son centre où les parcs et jardins sont
des espaces privés, tenus à l’abri des regards.
Les terres marécageuses de l’ancien bras de la Seine
sont rendues productives, et Paris bénéficie d’une
ceinture maraichère permettant à la population de
tenir un siège.
Au XVIIIe siècle, Paris est une ville dense qui compte
500 000 habitants, soit 45 000 hab./km². Les limites d’interdiction
de bâtir - soit une surface de 1 146 ha -, instaurées
par Louis XV, s’étendent des actuels Grands Boulevards
au nord, au Port-Royal au sud, et de la place de la Bastille à
l’est à la place XV - actuelle Place de la Concorde
- à l’ouest. La nature couvre 19 % du territoire
de Paris, soit une superficie de 213 ha constituée à
50 % de parcs et jardins publics et privés - 110 ha - et
30 % de maraîchage : 60 ha. Les 20 % restant sont des terrains
en friche et des zones inondables - 24 ha -, de grandes cultures
- 15 ha - et très localement de parcelles d’arboriculture
: 4 ha. Bien que le début du siècle soit marqué
par la construction de nombreux hôtels particuliers et de
bâtiments prestigieux, Paris reste une ville très
dense, sale, bruyante et encombrée, faite de rues étroites
et d’immeubles mitoyens hauts. Pour apporter air, eau et
lumière au coeur de la cité, les anciennes enceintes
de Louis XIII laissent place, à la fin du XVIIe siècle,
aux grands boulevards plantés d’arbres, de la porte
Saint-Antoine au cours de la Reine. De nouvelles avenues, en dehors
des limites parisiennes sont créées et plantées,
telles que l’avenue des Champs-Élysées, l’avenue
de Vincennes, l’avenue de Saint-Mandé et les avenues
entourant les Invalides.
Ces
avenues et boulevards prolongent le réseau des promenades
initié sous Henri IV - 1553-1610 - avec l’installation
de mails et de cours. Les mails sont de grandes allées
ombragées créées pour pratiquer le jeu de
mail, ancêtre du croquet. Le plus connu est le mail de l’Arsenal
- 1604 -, actuel boulevard Morland, bordé de deux rangées
d’ormes et d’une troisième constituée
d’ormes et de mûriers blancs. Les cours, quant à
eux, sont des promenades rectilignes permettant la progression
des carrosses. Le plus célèbre reste celui de Marie
de Médicis - 1608 -, actuel cours de la Reine. Il s’inspire
du corso italien et est planté d’ormes,
de mûriers blancs et de tilleuls. Au-delà de cette
ville dense, les grandes routes structurant le territoire et rayonnant
autour de la capitale sont plantées d’arbres depuis
le XVIe siècle, sous l’impulsion d’Henri II
puis de Sully - Maximilien de Béthune, dit Sully, ministre
d’Henri IV - pour alimenter le pays en bois de chauffage,
de construction et de marine, afin de compenser le grand défrichement
du Moyen-Âge. L’orme est alors l’arbre d’alignement
par excellence. Jusqu’au XVIIIe siècle, les jardins
et les bois sont privés. Ce sont des lieux de représentation
ou de production, appartenant au domaine royal, à la noblesse,
à la haute bourgeoisie ou au clergé. Le public n’y
est admis qu’avec parcimonie à l’exception
peut-être du jardin botanique - 1635 -, entièrement
dédié au savoir. Le jardin des Tuileries - 16 ha
-, le couvent des Chartreux - 16 ha -, le jardin du Luxembourg
- 13 ha - et le jardin du Roi - 8 ha - constituent près
de 50 % de l’ensemble des parcs et jardins. Le reste est
composé surtout des jardins privés des hôtels
particuliers et des congrégations religieuses. Ces jardins,
clos, tenus à l’abri des regards, s’inscrivent
dans la continuité avec les jardins de châteaux et
d’abbayes du Moyen-Âge, empruntant la juxtaposition
du potager, du verger et du jardin d’agrément. Ils
expriment cependant un tout autre rapport à la nature.
Le jardin d’agrément, dessiné à
la française ne représente plus le paradis
sur terre mais il met en valeur la raison et une forme de contrôle
de l’homme sur la nature. Le potager et le verger sont dimensionnés
pour subvenir aux besoins de la maison et un bois fournit une
réserve de chasse et de bois de chauffe aux grandes propriétés.
Intra-muros, les jardins d’hôtels particuliers sont
concentrés dans le Marais, le faubourg Saint-Germain et
sur les îles de la Cité et Saint-Louis. Ils sont
de petite taille, 0,1 ha tout au plus. Hors Paris, plusieurs jardins
existent aux abords des bourgs, notamment à Passy et Auteuil,
où de très nombreuses propriétés sont
apparues ou modifiées telle que la résidence de
la Muette, pavillon de chasse édifié sous Charles
IX et transformé en vaste Château en 1717 par Philippe
d’Orléans. Elles appartiennent à des congrégations
religieuses ou à des membres de la cour royale, comme le
château de Madame d’Orléans, de 60 ha, entre
Paris et Montreuil, ou le château de la Muette, 10 ha à
l’entrée du Bois de Boulogne.
À
partir du XIIe siècle, les moines ont défriché
les terres marécageuses de l’ancien bras de la Seine,
au nord de l’enceinte de Philippe Auguste, rendant cultivable
près de 450 ha sur près de 2 km de large. Ces marais
donneront leur nom aux maraîchers. Aux alentours de Paris,
les grandes propriétés structurent le paysage agricole.
Sous Philippe Auguste - 1180-1223 -, le territoire de Paris englobait
des cultures céréalières, maraîchères
et fruitières ainsi que des vignes en quantité suffisante
pour permettre à la population de résister à
un siège. Les cultures céréalières
et maraîchères se sont développées
dans les plaines et les vallées alluviales, alors que les
cultures fruitières et les vignes occupent les coteaux
de Montreuil, Ivry ou encore Clamart. Ainsi, entre les villages
de Belleville, Ménilmontant et Charonne, existent de très
nombreuses parcelles arboricoles allant jusqu’à Noisy-le-Sec
et Montreuil. Sous Henri III, le Bois de Boulogne avait été
clos par un ensemble de murailles afin de chasser une population
de détrousseurs et vagabonds avant d’être délaissé.
C’est Louis XIV, entre 1679 et 1703, qui souhaite renouer
avec la tradition de la chasse, fait tracer de grandes allées
rectilignes, nettoie le Bois et ses points d’eau. Le Bois
de Vincennes est lui réaménagé par Louis
XV selon les plans de 1703 de Robert de Cotte. Là aussi,
de grandes allées rectilignes, des ronds-points ainsi qu’une
totale replantation sont entrepris afin de rendre le bois grandiose.
La
Seine et la Marne possèdent encore leurs berges naturelles.
La place de grève - actuel quai de l’Hôtel
de Ville - est l’un des rares quais aménagés
et un nombre important de ces berges ou autres terres inondables
à proximité des cours d’eau sont utilisées
pour le stockage de bois qui arrive à Paris par bateau
: Bercy, Saint-Maurice, Île Louviers… La Bièvre
offre des terrains fertiles qui accueillent maraîchage et
agriculture, mais également tannerie, teinturerie.
|
La
nature à Paris en 1830
|
Après
la Révolution Française, les jardins s’ouvrent
au public et les grandes propriétés privées
disparaissent au fil du temps. Jusqu’au milieu du XIXe
siècle, 95 % des fruits et légumes consommés
dans la capitale sont produits en Île-de-France, notamment
sur les 1378 hectares de culture maraîchère intra-muros.
En 1831, la population est estimée à 786 000 habitants
intra-muros (Pourcher), soit 28 862 hab./km² ; en 1841,
on compte 915 000 habitants : 27 167 hab./km². En 1784,
le territoire parisien couvre 3 370 ha, matérialisé
par le mur des Fermiers Généraux, de la Place
de la Nation à l’est, à la Place de l’Étoile
à l’ouest et de la Place de la Bataille de Stalingrad
au nord à l’Observatoire au sud. La nature couvre
36 % du territoire urbanisé de Paris, soit une superficie
de 1 218 ha constituée à 44 % de maraîchage
- 539 ha - et 23 % de parcs et jardins publics et privés
: 279 ha. Le tiers restant est constitué de grandes cultures
- 202 ha -, de terrains en friche et zones inondables - 146
ha - et de parcelles d’arboriculture : 52 ha. Paris poursuit
sa croissance sous l’effet combiné de la création
des premières lignes de chemin de fer - Paris-Le Pecq,
qui sera inaugurée en 1837 - et de la révolution
industrielle qui attire vers la capitale une nouvelle population
rurale. Des terrains non cultivables et des marais, dans les
faubourgs du Temple, Saint-Martin et Montmartre et dans le clos
Saint-Lazare se transforment en quartiers salubres et aérés
sous l’influence des théories hygiénistes.
Dans le même temps, les premiers lotissements d’immeubles
de rapport voient le jour dans le quartier des Batignolles -
1820 -, le quartier François 1er - 1823 -, la plaine
de Passy - 1825 -, le quartier de Beaugrenelle - 1824 - ou encore
le quartier Europe : 1826. Ces lotissements marquent le début
des nouvelles formes d’urbanisation parisienne. La plupart
du temps, ils sont le fruit d’initiatives privées
- groupes de banquiers, d’investisseurs ou de promoteurs
- voulant répondre à une forte demande immobilière.
Ainsi, Les parcelles rurales sont transformées et urbanisées.
La
croissance démographique s’accompagne d’une
densification du tissu urbain et de la population. Les risques
de maladies s’aggravent au centre de Paris, où
l’habitat ouvrier se concentre : la ville de Paris devient
alors très insalubre. La montée de l’hygiénisme
pousse à promulguer le décret du 13 novembre 1806
qui interdit la présence d’animaux à l’intérieur
de Paris. En conséquence, cinq abattoirs apparaissent
aux portes de Paris : Montmartre, Ménilmontant, Ivry,
Grenelle et Miromesnil. L’agriculture entame alors un
recul spatial qui s’affirmera tout au long du XIXe siècle
et particulièrement la première moitié
du siècle, marquée par la volonté de repousser
toute forme de production agricole vers l’extérieur
au profit d’une extension de l’urbanisation. Dans
le même temps, les décrets se succèdent
pour interdire les inhumations à l’intérieur
de Paris afin de rendre la ville plus salubre. L’ensemble
des cimetières sont supprimés et un arrêté
préfectoral de 1801 prévoit la création
de trois cimetières hors des limites parisiennes : le
Père Lachaise en 1804, le cimetière Montparnasse
en 1824 et le cimetière de Montmartre en 1825. Le Père
Lachaise et celui de Montmartre sont conçus et réalisés
dans une esthétique romantique et naturelle.
Le Père Lachaise est le premier témoignage parisien
d’une réalisation funéraire dans laquelle
la promenade a toute sa place.
Jusqu’au
milieu du XIXe siècle et malgré l’urbanisation,
95 % des fruits et légumes consommés dans la capitale
sont produits en Île-de-France. Derrière la ceinture
maraîchère, les cultures sur les coteaux de l’est
parisien sont encore importantes, le plateau de Belleville-Montreuil
notamment est majoritairement viticole. Ainsi, toute la banlieue
horticole se spécialise, à Clichy, La Courneuve,
Drancy, Saint-Ouen, Saint-Denis, La Chapelle ou encore Pantin,
pour répondre à l’accroissement du marché
parisien. Dans le même temps, les espaces de culture disparaissent
du centre de Paris : des jardins privés des grandes institutions
publiques du sud-ouest parisien sont créés sur
d’anciennes parcelles maraîchères et un champ
de manoeuvre voit le jour, en 1765, entre l’École
Militaire et la colline de Chaillot. La périphérie
parisienne montre également des signes de décroissance
comme l’atteste le morcellement des espaces arboricoles
d’Ivry, de Montreuil ou encore de Noisy-le-Sec.
Les
grands parcs, jardins et bois sont progressivement ouverts au
public et les grandes propriétés privées
disparaissent au fil du temps. Un hospice de vieillards
est construit sur l’emplacement du château de Madame
d’Orléans et les grands jardins privés de
Bercy sont transformés en entrepôts pour le vin
en 1825. Dans le même temps, la population des villages
alentours augmente avec notamment l’apparition de maisons
de campagne à Sablonville ou à Meudon.
Après la révolution, la superficie et le nombre
de jardins ouverts à la population augmente, le jardin
de Neuilly apparaît et le jardin des plantes et le jardin
du Luxembourg sont agrandis.
Les
berges de la Seine et la Marne sont aménagées
pour faciliter l’accès et l’usage. Certaines
îles existant au siècle précédent
sont rattachées aux terres, comme l’Île des
Cygnes ou l’Île de Monsieur, à Sèvres.
Napoléon Ier fait réaliser, entre 1802 et 1825,
le canal de l’Ourcq, dans un double objectif de navigation
et de ressource pour l’alimentation en eau potable. Le
canal de l’Ourcq et le bassin de La Villette deviennent
rapidement des lieux de promenade et de distraction avant d’être
des ports industriels.
Extrait
de la vue de la partie occidentale de Paris,depuis le Val-de-Grâce
jusqu'à l'École Militaire, prise de Chaillot,
1811
©
gallica.bnf.fr / Bibliothèque Nationale de France
|


Aspect
des Grands Boulevards, vers 1810 ©
gallica.bnf.fr / Bibliothèque Nationale de France
|
La
nature à Paris en 1900 |
|
Entre
1830 et 1900, les grands travaux d’Alphand sous Haussmann
équipent, modernisent et embellissent Paris. L’important
développement urbain sonne la fin des grandes cultures
et les parcelles maraîchères disparaissent peu à
peu des portes de Paris.
Au
cours de la seconde moitié du XIXe siècle, le paysage
urbain de Paris est profondément transformé par
les travaux haussmanniens, la révolution industrielle et
l’arrivée du train. En 1860, l’annexion des
communes riveraines et l’exode rural massif ont provoqué
une hausse spectaculaire de la population parisienne. Le territoire
de Paris s’étend désormais jusqu’à
l’enceinte de Thiers construite en 1840. En 1856, on dénombrait
1 151 978 habitants (Pinol) et plus de 2 500 000 habitants à
la fin du siècle, pour une densité de 31 486 hab./km².
Cédés par l’État en 1852, les deux
bois ne seront administrativement rattachés à la
ville de Paris qu’en 1929. La surface de Paris couvre alors
7 940 ha. La nature couvre ainsi seulement 10 % du territoire
urbanisé de Paris, soit une superficie de 777 ha intra-muros
- 2 707 ha en comptant les Bois -, constituée à
73 % de parcs et jardins publics et privés - 564 ha - et
26 % d’espaces végétalisés divers -
203 ha composés pour l’essentiel des glacis des fortifs,
de quelques friches et terrains inondables - et d’une très
faible part de cultures maraîchères : 10 ha. Les
parcs et jardins ont augmenté de manière considérable
durant la seconde moitié du XIXe siècle, avec la
création de 300 nouveaux hectares : 564 ha en 1900 contre
278 ha en 1830. Le développement urbain de 1900 sonne la
fin des grandes cultures et du maraîchage avec la disparition
de plus de 750 ha.
La
ville est alors remodelée en profondeur. Avant les grands
travaux d’Haussmann, Rambuteau, alors préfet de la
Seine - 1833-1848 -, débute quelques travaux en lien avec
les théories hygiénistes. Il généralise
la présence des arbres d’alignements dans la capitale
avec la plantation de près de 40 000 arbres sur les avenues,
boulevards, quais et places. On reconnaît alors aux alignements
un rôle technique de stabilisation et d’assainissement
de la chaussée, ainsi que des qualités esthétiques
et climatiques. À ce propos, il écrira : Je
les égayais le plus que je pus avec des arbres, ces bons
amis de l’homme qui recréent les yeux et épurent
l’air. Ne fallait-il pas remplacer tant de jardins détruits
par la fièvre des constructions. Ces boulevards plantés
participent à la création du maillage des promenades,
alors perçues comme une pratique qui s’intègre
à la médecine puisqu’elle assure à
la fois mouvement, aération et exercice à ceux qui
la pratique. La notion de jardin public, exposée pour la
première fois dans les années 1830 par Loudon, est
contemporaine de la révolution industrielle et des premières
concentrations urbaines. Il faudra néanmoins attendre 1848
pour que le préfet Rambuteau réalise le premier
jardin public de Paris : le jardin de l’Archevêché
(square Jean XXIII aujourd’hui).
Le
parc Monceau en 1900 ©
http://paris1900.lartnouveau.com
Napoléon
III, inspiré par les villes anglo-saxonnes, confie - 1853-1870
- au baron Haussmann la transformation de Paris. Il dessine un
Paris moderne, plus ouvert et plus végétalisé
qu’il ne l’a jamais été, fait de grands
boulevards, de places en étoile, de promenades et de vastes
espaces verts. Parallèlement, les réseaux d’eau
et de gaz ainsi que les égouts sont créés
ou complétés. Haussmann perce plus de 200 km d’avenues
et de boulevards nouveaux afin de traverser la ville, d’améliorer
la circulation des personnes, des marchandises et de l’air
et d’apporter un éclairage naturel. Il crée
ainsi le maillage de promenades et un réseau de jardins
publics et de parcs. Paris compte alors près de 100 000
arbres : ce sont essentiellement des platanes - 33 % -, des marronniers
- 20 % - et des ormes : 18 % malgré la graphiose. Sous
la direction de Jean-Charles Alphand, les grands travaux sont
l’occasion d’offrir de nouveaux poumons à
la capitale. Les objectifs de ces aménagements sont simples
: se divertir, se rencontrer, se montrer dans un décor
codifié et proposant un résumé des scènes
de la nature. Il s’agit aussi de répartir les parcs
et jardins dans l’ensemble des quartiers. Le bois de Boulogne
puis celui de Vincennes sont transformés en vastes parcs
paysagers à l’anglaise. L’hippodrome de Longchamp
est inauguré dès 1857 et le jardin d’acclimatation
est achevé en 1860. Les grands parcs parisiens, dont le
parc Monceau, les jardins des Champs-Élysées et
les parcs des Buttes-Chaumont et de Montsouris sont créés
de toutes pièces ainsi qu’une multitude de squares
de toutes formes et de toutes dimensions : square des Batignolles,
d’Anvers, du Temple ou square Émile Chautemps et
les jardins de l’avenue Foch. La plantation des espaces
privés, en continuité de l’espace public -
frontage -, est inclue dans les nouveaux lotissements des belles
avenues de l’ouest parisien. Les fortifications s’accompagnent
d’un glacis enherbé, qui devient rapidement
un lieu de promenade pour les Parisiens, et d’une zone non
aedificandi, large de 250 m. À la fin du siècle,
cette zone » est investie de bicoques précaires,
de potagers et de parcelles maraîchères. La banlieue
absorbe encore peu l’afflux des nouveaux arrivants de la
capitale. Elle s’urbanise sous forme de lotissements de
pavillons sur d’anciennes terres agricoles. S’y développent
alors de nombreux jardins potagers. Ces jardins ouvriers caractérisent
la banlieue et leurs productions de fruits et légumes jouent
un rôle essentiel dans l’approvisionnement des familles.
Les lotissements de pavillons dans leurs jardins privés
constituent aussi un mode de vie nouveau de la bourgeoisie de
l’ouest parisien, notamment sur les coteaux qui dominent
la Seine à Sévres ou à Meudon et la Marne,
à Nogent ou à Joinville.
En
1844, l’ensemble des terrains employés à la
culture maraîchère dans la nouvelle enceinte de Paris
est d’environ 1378 hectares, divisés en 1800 marais
ou jardin. Les plus grands terrains sont d’environ 1 hectare,
et les plus petits d’environ 0,5 hectare. La seconde moitié
du XIXe siècle marque l’apogée de la culture
fruitière, à Ivry, Vaugirard et Montreuil où
les murs à pêches couvrent plus d’un tiers
de la commune, soit 320 hectares et 300 km de murs. Les luxueux
produits montreuillois s’exportent dans les cours européennes
et jusqu’à la table du tsar de Russie.
La
culture des vignes, très présente en Île-de-France
depuis le Moyen-Âge, disparaît à cette même
époque en quasi-totalité suite à la crise
du phylloxéra. En 1859, plus aucun maraîcher n’est
présent dans les douze arrondissements centraux. Ils sont
répartis à 45 % dans les arrondissements périphériques
- XIIe et XXe en majorité - et à 55 % en banlieue.
Dans les années qui suivent, les parcelles maraîchères
disparaissent aux portes de Paris sous la pression urbaine, les
communes de Clichy et de Boulogne voient toute trace d’agriculture
disparaître, et les vignes et vergers disparaissent également
des plateaux d’Ivry et de Meudon.
Jusqu’au
second Empire, les rives de la Seine sont quasi exclusivement
utilisées pour des activités économiques.
Depuis le milieu du XIXe siècle, les Parisiens fréquentent
les berges de la Marne et ses guinguettes. Au début du
XXe siècle, les berges de Seine sont un lieu de détente
et d’activités de loisirs pour les parisiens. On
y pêche, on s’y baigne et des bals y sont organisés.
Le canal Saint-Martin est couvert par Haussmann entre la place
de la Bastille et la place de la République. Le boulevard
Richard-Lenoir est ainsi créé et les premiers jardins
sur la couverture sont dessinés par Alphand, en 1860. |
Étude
Évolution de la nature
à Paris, de 1730 à
nos jours
Cette étude de l’évolution
de la nature de 1730 à nos jours a été
réalisée dans le cadre de la recherche-action
Naturpradi :
Nature(s) urbaine(s) en pratique(s) digitale(s), menée
par le laboratoire LAVUE / LAA, financée par l’AAP
MODEVAL URBA, Ademe 2016-19.
Directrice de la publication : Dominique ALBA
; Sous la direction de : Christiane BLANCOT
Note réalisée par : Tristan LAITHIER,
Yann-Fanch VAULÉON ; Avec le concours de
: Hélène IMPINI, Morad KHALOUA
Cartographie et traitement statistique : Alain
BEAUREGARD, Marie-Thérèse BESSE
|
|
|
|
Une
cartographie interactive |
|
Les ressources cartographiques
présentées ici sont également disponibles
par une cartographie interactive. Celle-ci propose de comparer
les 6 cartes de manière à évaluer les
modifications de l’occupation de la nature sur le
territoire parisien. La mise en perspective des
périodes aide à la compréhension de
l’évolution et des particularités de
la nature à Paris. Afin d’évaluer les
différences avec l’occupation
du sol actuelle, la cartographie interactive permet d’intégrer
le territoire parisien d’aujourd’hui. Nous pouvons
ainsi examiner et comparer
le tissu urbain actuel avec celui des cinq dates étudiées.
Cet outil permet aussi de consulter les plans de référence
utilisés. L’analyse de
ces plans donne la possibilité d’observer,
de manière détaillée, l’occupation
du sol de Paris depuis 1730.
|
|
|
apur.org |
|
|
|
|